Les deux pinceaux aquarelles ci-dessous ont au moins douze ans d'âge. C'est avec eux que j'ai mis en couleurs presque tous mes livres.
Leur rôle est de poser les "jus" qui donneront la teinte dominante de la page et/ou de la case.
Ce sont de loyaux compagnons, qui, malgré les années, ne rechignent pas à la tâche et dont je connais exactement le comportement.
Les freluquets qui posent avec eux ne méritent pas le même considération: au bout de quelques pages, ils protestent. Leur mise en pli rend l'âme, leur brushing ne tient plus. Ils réclament du repos, des attentions particulières.
Poubelle.
Ha, folle et inconséquente jeunesse. C'est pas mes deux vieux grognards qui me lâcheraient comme ça. Et si un jour -soyons fort- ils doivent eux aussi m'abandonner, j'en porterai le deuil quarante jours.
Les deux pots dégueulasses contiennent les deux couleurs qui me servent à raconter l'ombre, la lumière et la fraîcheur des deux volumes de "Lulu femme nue".
Le premier est un mélange maison d'ocre, de jaune, de rouge et de noir qui m'inquiète un peu. Il s'épaissit inexplicablement avec le temps. J'espère aller avec lui au bout du second livre sans encombre.
L'autre est un pénible cobalt à peine modifié qui présente l'inconvénient de sécher en dépit de toute logique.
Trop tard pour en changer.