vendredi 27 février 2009

Rien

Aujourd'hui, rien.
Journée consacrée à de sombres tâches administratives, preuves absolues de l'absurdité de la vie humaine.

Allez donc plutôt voir la chouette note du jour de Boulet.

jeudi 26 février 2009

Un héros méconnu

Reçu ce matin, alors que j'achevais la mise en couleurs des planches 28 à 30, un exemplaire du troisième tirage de Lulu 1, nanti de son "sticker" angoumoisin.



Ayons, si vous le voulez bien, une pensée reconnaissante pour l'obscur laborantin qui a mis au point le principe paradoxal d'une colle qui se décolle sans endommager la surface sur laquelle elle a été appliquée tout en ne lâchant pas prise tant qu'on ne lui a pas demandé.

Je ne te connais pas, ami, mais sache que j'apprécie ta prouesse à sa juste valeur tant sont grands à la fois mon plaisir de voir ce sticker sur la couverture de mon livre et mon soulagement de savoir qu'il peut en être ôté sans dégâts.

J'imagine tes heures de recherches, tes poumons irrités par les différents solvants que tu testais, les dizaines d'essais avortés. j'entends le bruit du pelliculage de la couverture qui s'arrache avec l'autocollant, j'entends ton soupir de dépit. Et je te vois retourner à la tâche, résolu, sacrifiant même tes RTT pour atteindre ton but.

Sois tranquille, ta victoire est totale. De mon exemplaire tout neuf, le petit machin rouge et blanc s'est détaché sans drame. Et je suis certain qu'il en sera de même des 4999 autres.

Parce que bon,même si sa présence est évidement une bonne nouvelle, là, juste sous le regard de Lulu, il altère un peu l'image.
C'est fragile, une image.

mardi 24 février 2009

Questions

La planche 27, mise en couleurs.



Aujourd'hui, conversation avec un jeune homme qui envisage de se lancer dans la bande dessinée. Il voulait savoir "comment".
Je lui ai d'abord demandé "Pourquoi?".

C'est une question vache.


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lundi 23 février 2009

Lucie

J'ai consacré ma matinée à une interview, pour une revue.
Ça n'est pas toujours le cas, mais cette fois le journaliste avait bien préparé ses questions. Il s'était très peu perdu en ralliant ma pampa (une fois, j'en ai récupéré un tout amaigri dans un chemin creux). J'avais fait du thé. Le chat était en embuscade dans l'escalier, au cas où. Bref, un moment plutôt agréable.
Puis il me dit que Lulu lui fait penser à Lucie, personnage d'Anticyclone, livre que j'ai commis chez Delcourt il y a dix ans.
Sobrement, je lui fais remarquer que le personnage principal d'Anticyclone se prénomme Nina, n'est-ce pas, et qu'en plus ces deux femmes n'ont vraiment rien en commun, mais c'est pas grave tout le monde peu dire une connerie, on est lundi matin.
Et lui, poliment, me précise que c'est à un autre personnage du livre qu'il fait allusion, une femme au foyer elle aussi insatisfaite de son existence endormie, que Nina vient troubler.
Et puis, en plus, ces prénoms... Lucie, Lulu, la relation lui semble évidente.



Si j'avais fait preuve d'un peu de sang froid, j'aurais pris alors un air pénétré et je me serais lancé dans un long monologue sur les liens subtils que je tisse entre mes livres.

Mais j'ai juste dit "Ha bah merde, t'as raison, c'est rigolo."

Cet après-midi, j'ai mis en couleurs la planche 26.

samedi 21 février 2009

Un cap



Quelque chose me dit que je viens de franchir, avec l'encrage de cette planche 30, un passage délicat de ce récit.
Pas mécontent.

Me reste à le mettre en couleurs, avant d'en être certain et de voguer vers de nouveaux horizons. Ce sera mon job de la semaine prochaine.
Prétendre "en être certain" est de ma part une preuve d'optimisme et de naïveté, tant il est avéré qu'une planche peut être perçue comme satisfaisante un jour et totalement caduque le mois suivant.

Elles auraient donc, à l'instar des plus basses cochonailles, une sorte de date de péremption, qui les précipiterait à la poubelle?
Hé ouais.

Jusqu'au moment où l'éditeur vient me les arracher arme au poing, elles ne sont à l'abri de rien.

Ensuite, bien à l'abri dans le livre imprimé, elles me narguent en ricanant.

jeudi 19 février 2009

Improvisation

La planche 29 est encrée.

La planche 30 est crayonnée.


Dans mon scénario, cette séquence était comme un vilain petit trou d'air que je voyais enfler au fur et à mesure que je m'en approchais. Je sais bien que je me suis souvent fait avoir à ce p'tit jeu, mais au moment de l'aborder, j'ai tout envoyé balader pour la remplacer par une scène totalement improvisée, directement sur la planche.

L'improvisation a ceci de fascinant, qu'elle nous permet d'être simultanément l'auteur ET le lecteur de la page qui naît.

C'est un exercice très amusant dont j'essaie de profiter au maximum en réalisant ce livre, et dont j'ai pleinement goûté les épices en dessinant L'atelier (ed Les Rêveurs), un discret petit livre, qui est totalement improvisé, tant au niveau du scénario que du dessin.
Hop là. Une page de publicité habilement amenée, non?

mercredi 18 février 2009

Rancune


Planche 29 crayonnée.

C'était une case parmi des milliers d'autres. Elle m'attendait en embuscade au milieu de cette planche. Pas particulièrement difficile. Ni angle de vue compliqué, ni positions alambiquées, ni décors pénibles. Une case banale. Pas d'exploit technique.
Alors pourquoi m'a t-elle pourri la matinée?

Une case maudite. Ça arrive de temps en temps. On est devant un mur à franchir, on l'a fait des centaines de fois. Parfois les mains dans les poches, parfois de haute lutte. Parfois en trichant un peu (hé oui). Mais, toujours, on passe l'obstacle, avant d'aborder le suivant.

Et là, je sais pas, un petit salaud a savonné le mur. On patine, on dérape. On ne sait plus faire. On s'obstine en vain. On s'énerve. On se déconcentre. On se reconcentre. On profère des insanités. Le dessin, cette paisible activité moniale, devient un grossier combat de catch, avec sa sueur et ses trucages à deux balles.

Et la case vous prend cinq heures.

Ne pas chercher à comprendre. Y'a des jours comme ça. Demain ça ira mieux.

La seule chose qui me console, c'est que, dans quelques mois, quand vous lirez le livre, vous passerez sur les lieux de ce sanglant combat sans rien voir. J'ai soigneusement épongé le ring.

Mais j'oublie pas.

mardi 17 février 2009

Blues

Planche 28, crayonnée et encrée aujourd'hui.


Et pourtant je ne vous cache pas que le moral n'y est pas.
J'ai très probablement raté ma vie.
Même si quelques années de sursis me sont accordées, je sens bien que c'est foutu.
En effet, un de nos grands penseurs hexagonaux, conseiller matrimonial de Talonnettes Premier vient de définir, dans une formule fulgurante et magnifique, la condition d'une vie réussie.

Il me faut regarder les choses en face: même si, par miracle, lecteurs chéris, vous propulsiez mon niveau de vie à des hauteurs me permettant l'achat d'un tel symbole, je crois bien que je n'oserais pas. Je ne m'en sentirais pas digne.

J'ignore ce qui pousse ainsi les gens à se ridiculiser en public. Les mouvement de l'âme sont bien mystérieux.
Ce qui fout un peu les jetons, c'est que cette tête pleine d'eau conseille nos hommes d'état depuis longtemps.


C'est ainsi que le prétendu pays des Lumières devient le pays des reflets.

lundi 16 février 2009

Le corps et l'esprit

Il en va des auteurs de bande dessinée comme des employés de banque et des fonctionnaires de la sécurité sociale: l'inaction physique que leur impose leur activité quotidienne peut engendrer de graves dommages sur leur état physiologique général.
Il importe donc de sortir régulièrement la bête et de la laisser s'ébrouer au grand air.
C'est ce souci qui m'a poussé à vous abandonner lâchement ces derniers jours pour une semaine de randonnée en raquettes en Sibérie (bon, c'était pas exactement la Sibérie, mais les conditions météo ont essayé de nous le faire croire).

Me voilà donc de retour. C'est tout émoussé par les joyeuses agapes angoumoisines que j'avais quitté mon atelier. Et c'est le jarret affûté et le cerveau tout irrigué de bon sang frais nettoyé par l'air glacé que j'y reviens.
Ça va barder. Les planches vont tomber. Tenez-vous bien.

samedi 7 février 2009

Des passants


Planche 27 encrée.

Mon petit billet de jeudi semble avoir fait réagir -dans tous les sens- certains d'entre vous.
Et, accessoirement, il a propulsé la fréquentation de ce blog vers des scores inhabituels.
Curieux, hein, comme ces histoires de prix font causer?

Des nouvelles du troisième tirage du premier volume de Lulu femme nue:
Il sera en librairie le 20 février, après , sans doute, quatre ou cinq jours de rupture. Hé oui, on dirait bien que ce Fauve a fait son petit effet.

Brave bête.

vendredi 6 février 2009

Soupçon

Non seulement le story-board a progressé cette semaine bien au-delà de la planche 30, mais, en plus, la planche 26 est encrée...

... et la 27, crayonnée (tout ça sans dopage).


Vous ai-je dit que je travaillais souvent en écoutant la radio? Non?
Hé bien figurez-vous que je travaille souvent en écoutant la radio.

Je sais, c'est dingue.

En général, c'est juste un fond sonore auquel je ne prête qu'une attention variable. Mais avant-hier, j'ai tendu l'oreille en entendant une information que j'ai aussitôt recherchée sur le web.
Je l'ai transmise à Joub, avec qui je réalise Geronimo.
On est en train d'étudier l'hypothèse d'attaquer en justice ces gens-là qui se sont visiblement inspirés de nos personnages.
Les bougres sont malins: ils se sont arrangés pour commencer à vivre comme ça plusieurs années avant que nous n'imaginions le scénario de Geronimo.

Mais ça sent à plein nez l'alibi fabriqué exprès de toutes pièces, non?

jeudi 5 février 2009

"Élitisme"

Comme après chaque palmarès charentais, les ondes engendrées par les choix du jury font frissonner le (tout) petit monde de la bande dessinée.
Le plus souvent, ce débat crapote au ras du gazon à grands coups de « J’aime », « J’aime pas ». Certains hurlent à la cécité du jury qui a encore oublié leur idole dans sa liste. On évoque le copinage et ses ravages. On se félicite du choix d’untel, on ricane d’un air supérieur devant tel autre.
Il arrive même que s’amorcent des débats instructifs sur ce que la sélection annuelle nous dit de l’état de la bande dessinée.
Et puis, invariablement, au bout de quelques jours, ce petit pugilat s’essouffle dans l’indifférence générale et chacun retourne à ses occupations.

Cette fois encore, vieille rengaine immémoriale, on accuse le jury d’avoir fait preuve, dans ses choix, d’ « élitisme ». Ha le vilain mot.



Et comme, cette année, cette accusation me concerne aussi en tant que lauréat, je voudrais préciser ceci :
Je ne m’adresse pas à un « public », mais à un lecteur, et pour être plus précis, à UNE personne.
Un livre, tel que je le conçois, c’est ça : une personne qui parle à une autre personne. Si vous lisez ce blog, je suppose que vous êtes cette personne.
Et, pardonnez-moi, je me fous de votre situation sociale, de vos revenus et de votre niveau d’éducation.
Et si l’élite, par définition, est un groupe restreint d’individus, elle ne m’intéresse pas plus que ça (d’ailleurs, à la lecture de ces propos, ma maison d’édition et mon banquier opinent frénétiquement du chef).

Je peux concevoir que Lulu femme nue soit considéré comme un projet assez conventionnel par les tenants d’une bande dessinée très radicale. Je peux même, dans une certaine mesure, être d’accord avec eux.
Mais pour qualifier Lulu femme nue de livre « élitiste », il faut avoir, de la bande dessinée, une conception foutrement étriquée et lui assigner un bien médiocre destin.
On perçoit aussi dans cette posture un mépris réel pour le lecteur et pour ce qui lui suffirait et ça, c’est plus emmerdant.

Ceux qui me lisent et les visiteurs réguliers de ce blog ont sans doute compris que je nourris bien peu de certitudes quant à mon travail.

Mais dans mes rêves les plus optimistes, j’aime espérer que mes livres s’adressent à la plus belle part de vous-même.

À votre élite.

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mardi 3 février 2009

Fauves

Je ramène donc un Fauve d'Angoulême.
Jaloux et possessif, celui qui régnait jusqu'à aujourd'hui dans mon atelier semble prendre la chose assez mal.



Je vais sans doute devoir me résoudre à héberger le nouvel arrivant ailleurs.
Va t-il falloir entamer des négociations avec les araignées du grenier?

Plus sérieusement, je vous remercie pour tous vos messages auxquels je répondrai dans les jours qui viennent.
Futuropolis vient de m'annoncer le lancement du troisième tirage de Lulu femme nue, premier livre.
Et je vous ai menti la semaine dernière: je ne vais pas pouvoir beaucoup avancer sur mon story-board cette semaine.